Da Le Monde del 14/04/2005
Originale su http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3224,36-638455@51-634441,0.html
La difficile entrée en campagne de Jacques Chirac
di Béatrice Gurrey
Encore un. Mardi 12 avril, deux jours avant l'intervention télévisée de Jacques Chirac, jeudi soir sur TF1, dans la campagne référendaire sur la Constitution européenne, un treizième sondage consécutif donnait le non gagnant. C'est dire si le défi est sérieux pour le chef de l'Etat. Il a choisi de consulter les Français, il doit désormais les convaincre.
Il est trop tard pour regretter, comme certains chiraquiens, de ne pas avoir recouru à la ratification du traité par le Parlement, confortable puisque assurée. En acceptant le référendum que tous réclamaient, car jugé plus démocratique, M. Chirac s'est placé en première ligne.
Il ne faut donc pas s'étonner que montent des interrogations sur son attitude en cas de victoire du non. Devrait-il démissionner ? Comme souvent, Nicolas Sarkozy a tiré le premier. "Nous sommes dans une situation qui s'apparente à celle de 1969", avait déclaré le président de l'UMP, le 6 avril à Nantes, en faisant allusion à la démission du général de Gaulle, après le non à la réforme du Sénat et des régions.
"Cela n'a aucun sens. Ce n'est pas la personne de Jacques Chirac qui est en cause, c'est l'avenir de l'Europe", rétorque un conseiller du président. "Quand le référendum sur la Corse, que Nicolas Sarkozy réclamait, a été perdu, il n'a pas démissionné de son poste de ministre de l'intérieur", observe Jean-Louis Debré, le président de l'Assemblée nationale.
Il est vrai que le président de l'UMP avait ajouté : "Les gens croient qu'en votant non, Chirac partira. Eh bien, il ne partira pas." L'entourage du chef de l'Etat ne se fait pas prier pour confirmer qu'il a raison. Et l'un des piliers de l'Elysée d'ajouter : "Une dissolution n'est pas envisageable non plus. On ne va pas sanctionner l'Assemblée nationale parce que les Français auraient voté non." M. Chirac a "soupé" de la dissolution de 1997, rappelle un ministre. L'un de ses artisans de l'époque, Dominique de Villepin, a confirmé, mardi, dans France-Soir, que M. Chirac ne quittera pas son poste. "Comment imaginer que le chef de l'Etat, aujourd'hui, dans un pays qui, à la suite du non, serait plongé dans une crise profonde, puisse abandonner ses fonctions ?", demande le ministre de l'intérieur. Bref, lui ou le chaos, mais sans remettre en jeu son mandat.
LE POIDS DE L'ÉLARGISSEMENT
Avant l'échéance du 29 mai, M. Chirac prévoit d'autres difficultés. Le 16 avril, cela fera deux ans, jour pour jour, que le traité d'élargissement a été signé, à Athènes. "Les gens pensent maintenant que cela s'est fait sans qu'on leur en explique les conséquences", note un conseiller du chef de l'Etat. "C'est l'un des non-dits de la campagne. L'élargissement pèse beaucoup plus que la Turquie. On n'a pas fait de pédagogie sur l'entrée des dix", renchérit François Cornut-Gentille, le chef de file de la Boussole, club de députés chiraquiens.
De plus, l'Union européenne doit bientôt négocier l'entrée de la Bulgarie et de la Roumanie. "La Bulgarie entrera en 2007", avait dit M. Chirac, à Marseille en novembre 2004. La Roumanie est " un peu en retard, mais nous ne concevons pas une remise en cause de l'entrée simultanée de la Roumanie et de la Bulgarie et donc elles entreront ensemble", avait-il ajouté.
Attention, ont averti quelques députés, les électeurs ont du mal à comprendre que la Constitution française a été modifiée pour qu'ils puissent se prononcer, dans dix ou quinze ans, sur l'entrée de la Turquie, mais qu'ils ne peuvent rien sur les futures adhésions qui sont déjà "dans les tuyaux". Et dire que M. Chirac ne peut même plus compter sur la gauche ! "C'est de là que vient la défection !", fulmine un ministre chiraquien. " Le président est là, il fera activement campagne, même s'il doit connaître encore plus de difficultés. Mais elles seront surtout à gauche. Les socialistes vont exploser, et violemment", prédit-il. Pour ce proche du président, la droite ne sera " pas brillante", si le non l'emporte, mais le PS, " incapable d'être cohérent, sera pitoyable". A moins que Lionel Jospin ne rafle la mise, comme le pensent de nombreux hiérarques à droite, qui ont noté, mercredi, la présence de l'ancien premier ministre à l'Hôtel de Ville de Paris, pour accueillir le président portugais Jorge Sampaio.
Le chef de l'Etat n'ignore pas qu'il ne peut pas s'appuyer sur son premier ministre. Mais là-dessus, motus. S'il a laissé entendre à des proches, il y a quelques semaines, qu'il réfléchissait à l'après-29 mai, éventuellement sans M. Raffarin, M. Chirac ne laisse, depuis, plus rien filtrer. Car il a vu le résultat : une curée contre le chef du gouvernement et une foule de candidatures spontanées pour Matignon, au premier rang desquelles celle de M. de Villepin. Il " s'est fait souffler dans les bronches" par le président, témoigne un compagnon de longue date de ce dernier. Après l'interview sur Europe 1, vendredi 1er avril, du ministre de l'intérieur, l'Elysée avait l'air de trouver que tout était rentré dans l'ordre : "Il a été énergique, clair. Il est respectueux des choses et bosseur..."
Mais, au total, M. Chirac, qui sera depuis dix ans à l'Elysée en mai, reste bien seul au sommet. Son intervention de jeudi n'est que la première. Elle sera, pourtant, essentielle.
Il est trop tard pour regretter, comme certains chiraquiens, de ne pas avoir recouru à la ratification du traité par le Parlement, confortable puisque assurée. En acceptant le référendum que tous réclamaient, car jugé plus démocratique, M. Chirac s'est placé en première ligne.
Il ne faut donc pas s'étonner que montent des interrogations sur son attitude en cas de victoire du non. Devrait-il démissionner ? Comme souvent, Nicolas Sarkozy a tiré le premier. "Nous sommes dans une situation qui s'apparente à celle de 1969", avait déclaré le président de l'UMP, le 6 avril à Nantes, en faisant allusion à la démission du général de Gaulle, après le non à la réforme du Sénat et des régions.
"Cela n'a aucun sens. Ce n'est pas la personne de Jacques Chirac qui est en cause, c'est l'avenir de l'Europe", rétorque un conseiller du président. "Quand le référendum sur la Corse, que Nicolas Sarkozy réclamait, a été perdu, il n'a pas démissionné de son poste de ministre de l'intérieur", observe Jean-Louis Debré, le président de l'Assemblée nationale.
Il est vrai que le président de l'UMP avait ajouté : "Les gens croient qu'en votant non, Chirac partira. Eh bien, il ne partira pas." L'entourage du chef de l'Etat ne se fait pas prier pour confirmer qu'il a raison. Et l'un des piliers de l'Elysée d'ajouter : "Une dissolution n'est pas envisageable non plus. On ne va pas sanctionner l'Assemblée nationale parce que les Français auraient voté non." M. Chirac a "soupé" de la dissolution de 1997, rappelle un ministre. L'un de ses artisans de l'époque, Dominique de Villepin, a confirmé, mardi, dans France-Soir, que M. Chirac ne quittera pas son poste. "Comment imaginer que le chef de l'Etat, aujourd'hui, dans un pays qui, à la suite du non, serait plongé dans une crise profonde, puisse abandonner ses fonctions ?", demande le ministre de l'intérieur. Bref, lui ou le chaos, mais sans remettre en jeu son mandat.
LE POIDS DE L'ÉLARGISSEMENT
Avant l'échéance du 29 mai, M. Chirac prévoit d'autres difficultés. Le 16 avril, cela fera deux ans, jour pour jour, que le traité d'élargissement a été signé, à Athènes. "Les gens pensent maintenant que cela s'est fait sans qu'on leur en explique les conséquences", note un conseiller du chef de l'Etat. "C'est l'un des non-dits de la campagne. L'élargissement pèse beaucoup plus que la Turquie. On n'a pas fait de pédagogie sur l'entrée des dix", renchérit François Cornut-Gentille, le chef de file de la Boussole, club de députés chiraquiens.
De plus, l'Union européenne doit bientôt négocier l'entrée de la Bulgarie et de la Roumanie. "La Bulgarie entrera en 2007", avait dit M. Chirac, à Marseille en novembre 2004. La Roumanie est " un peu en retard, mais nous ne concevons pas une remise en cause de l'entrée simultanée de la Roumanie et de la Bulgarie et donc elles entreront ensemble", avait-il ajouté.
Attention, ont averti quelques députés, les électeurs ont du mal à comprendre que la Constitution française a été modifiée pour qu'ils puissent se prononcer, dans dix ou quinze ans, sur l'entrée de la Turquie, mais qu'ils ne peuvent rien sur les futures adhésions qui sont déjà "dans les tuyaux". Et dire que M. Chirac ne peut même plus compter sur la gauche ! "C'est de là que vient la défection !", fulmine un ministre chiraquien. " Le président est là, il fera activement campagne, même s'il doit connaître encore plus de difficultés. Mais elles seront surtout à gauche. Les socialistes vont exploser, et violemment", prédit-il. Pour ce proche du président, la droite ne sera " pas brillante", si le non l'emporte, mais le PS, " incapable d'être cohérent, sera pitoyable". A moins que Lionel Jospin ne rafle la mise, comme le pensent de nombreux hiérarques à droite, qui ont noté, mercredi, la présence de l'ancien premier ministre à l'Hôtel de Ville de Paris, pour accueillir le président portugais Jorge Sampaio.
Le chef de l'Etat n'ignore pas qu'il ne peut pas s'appuyer sur son premier ministre. Mais là-dessus, motus. S'il a laissé entendre à des proches, il y a quelques semaines, qu'il réfléchissait à l'après-29 mai, éventuellement sans M. Raffarin, M. Chirac ne laisse, depuis, plus rien filtrer. Car il a vu le résultat : une curée contre le chef du gouvernement et une foule de candidatures spontanées pour Matignon, au premier rang desquelles celle de M. de Villepin. Il " s'est fait souffler dans les bronches" par le président, témoigne un compagnon de longue date de ce dernier. Après l'interview sur Europe 1, vendredi 1er avril, du ministre de l'intérieur, l'Elysée avait l'air de trouver que tout était rentré dans l'ordre : "Il a été énergique, clair. Il est respectueux des choses et bosseur..."
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